Opposés à l’extension du parc d’activités des Portes de Bretagne, la confédération paysanne, des collectifs de riverains et des élus d’opposition s’inquiètent de l’artificialisation des sols et de la potentielle dégradation du cadre de vie qu’engendrerait un tel projet. La communauté de communes tient à rassurer les habitants sur le projet.
Le 27 juillet 2021, la Confédération paysanne d’Ille-et-Vilaine (Conf’35) a refusé la compensation financière offerte pour l’artificialisation des terres agricoles sur lesquelles le futur parc d’activités des Portes de Bretagne n° 2 (PAPB2) doit être construit. Prévu depuis 2016, ce projet de zone d’aménagement (ZA) est censé répondre au manque de place pour les entreprises souhaitant s’installer à Servon-sur-Vilaine, près de Rennes (Ille-et-Vilaine), une zone attractive pour sa gare et sa proximité avec la quatre voies.
Accueillir des entreprises
« Quand est-ce que ça va s’arrêter ? » s’interroge Simon LeHuger, membre de la Confédération paysanne d’Ille-et-Vilaine à propos de l’artificialisation des sols, leur imperméabilisation pour pouvoir construire par-dessus. « Il y en a eu beaucoup dans l’est de Rennes ces dix dernières années », rappelle-t-il.
« On a des demandes d’entreprises très intéressées par ce secteur-là », justifie de son côté Dominique Denieul, président de la communauté de communes du pays de Châteaugiron, interrogé sur les raisons d’extension du parc d’activités servonnais. « Nous n’avons plus de terrains à disposition pour recevoir les entreprises et les artisans qui souhaitent rester sur le pays de Châteaugiron. Si nous ne sommes pas en capacité de pouvoir les accueillir des entreprises, il y a des risques pour l’emploi », explique-t-il.
Taux de chômage bas
« On ne va pas créer d’emploi, on va juste le rassembler au même endroit dans la métropole de Rennes, au détriment d’autres zones comme le Centre-Bretagne, la Mayenne, le Centre de la France, des zones qui bataillent pour avoir des emplois alors que le taux de chômage du département est bas », répondent les opposants au projet. « Le taux de chômage est bas mais il y a encore des demandeurs d’emploi, et le département accueille 8 000 à 10 000 personnes par an », nuance Dominique Denieul.
Peur d’une zone industrielle
« On ne sait pas où on va avec ce projet : quels types d’entreprises vont s’installer ? Combien ? Quelle énergie vont-elles consommer ? » s’inquiètent Thierry Panaget et Benoît Faucher, tous deux élus d’opposition à la communauté de communes du pays de Châteaugiron et membres de Stop PAPB2, collectif de riverains et d’élus. Ils s’inquiètent du fait que le projet est une extension d’un premier parc, accueillant des entreprises industrielles comme Bridor et Celsius, dont les usines sont gourmandes en énergie et en eau.
Dominique Denieul tient à rassurer : « Il n’est pas question d’accueillir uniquement des entreprises industrielles, celles qu’on accueille travaillent sous l’angle environnemental. » Il ajoute : « Le projet a été soumis à enquête publique et les conclusions du commissaire enquêteur étaient favorables. Bien sûr qu’il faut aménager en intégrant les thématiques environnementales, ce sera l’objet de l’étude qu’on va soumettre à l’autorité de l’État. L’objectif sera de rendre le projet le moins impactant possible. »
« Préservation du cadre de vie »
« On est pour la préservation du bien-être et du cadre de vie des habitants. Nous sommes une commune de la ruralité. On ne veut pas la transformer en zone industrielle. Il y a un cadre de vie et un environnement sains. Or, on commence à avoir des impacts négatifs : les bouchons, les bruits, l’altération du cadre de vie », s’inquiète le collectif Stop PAPB2.
Avec l’installation du premier parc d’activités, le trafic de poids lourds s’est intensifié dans la zone et des bouchons se forment tous les matins sur le carrefour menant à la quatre voies. « L’objectif est aussi de reprendre les problèmes de circulation, de nuisances sonores et d’engagement sur la quatre voies. On a fait un nouveau plan de circulation », rétorque le président de la communauté de communes.
Préoccupations environnementales
« Vu l’urgence écologique et la demande sociétale pour consommer local, détruire des terres, ça ne va pas », s’alarme Simon LeHuger. « Il faut protéger les sols agricoles », défend-il. « Il n’y aura plus d’activité biologique si ce sol est bétonné. Le sol a un rôle dans la gestion du cycle de l’eau. En la retenant, il emmagasine aussi le carbone qui risque de se retrouver dans l’atmosphère. Si on le détruit, pour chaque hectare, c’est entre trente et cinquante tonnes de carbone dans l’air », explique-t-il.
Sur son site, le ministère de la Transition écologique pointe l’artificialisation des sols comme « l’une des causes premières du changement climatique et de l’érosion de la biodiversité ». « On ne construit plus une zone aujourd’hui comme il y a dix ans, rétorque Dominique Denieul, on prendra en compte les contraintes imposées par l’État aux collectivités sur les zones d’activités. On a déjà retiré une partie du projet en viabilisant deux zones humides qui étaient dans le prolongement de la quatre voies. »
« L’activité agricole est une activité écologique. Réduire des terres, c’est détruire des emplois. On peut trouver des alternatives dans la production maraîchère, d’autres formes d’agriculture ou l’artisanat », préconise Simon LeHuger. « La première préoccupation a été de proposer des solutions aux agriculteurs, on avait trouvé des terres pour les relocaliser dans le pays de Vitré », répond Dominique Denieul. « Il y a des terrains libres dans les zones industrielles de la communauté de communes. Recycler le foncier existant devrait être une priorité. Il y a une volonté du gouvernement de recycler des friches industrielles », ajoutent Thierry Panaget et Benoît Foucher.
Damien Gentilleau, élu d’opposition et membre du collectif Stop PAPB2, explique vouloir « alerter du côté de la population » concernée, soit une demi-douzaine de maisons et une ferme, situées dans le périmètre de construction, ainsi qu’une cinquantaine d’habitants « qui vont se retrouver avec des maisons entourées de hangars » et « 80 habitations de l’autre côté de la quatre voies ». Tous ensemble, riverains, élus d’opposition et membres de collectifs de la Confédération paysanne prévoient des actions « dès la rentrée ».
© Ouest-France – Article du 12/08/2021